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mardi 1 juin 2010

Les militants, le "nousnoiment"

Extraits du blog-livre "Journal au jour le jour d'une grève
 de la faim dans un village occitan" (lien)



 
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Samedi 26 juin 

L'article [de Michel Pernet, de la Marseillaise] est paru. Bien sauf que sur la photo, j'ai l'air d'un cadavre, les seins complètement, non pas en code mais en veilleuse, sous la ligne de flottaison, un indice comme les oreilles d'un berger allemand. Normal. Les anciens combattants militants de l'Arac [invités à une cérémonie à la Mairie] sont venus. Ni Jacques ni surtout Pierre n'ont eu le cran de venir me voir, ce n'était pas l'ordre du jour. Ça confirme : les gens sont à deux ou trois niveaux. Excellents syndicalistes, militants dévoués, à l'écoute des autres.. cependant aussi à la recherche d'un pouvoir, minime mais bon : militer est tellement ingrat qu'il faut bien une compensation... ce qui les conduit à ne pas se mouiller parfois -même si c'est idiot car ce n'est pas ça qui l'aurait gêné dans son ascension, au contraire-. Décevant ? Même pas, après l'euphorie de l'annonce, je m'y attendais. Il n'a pas la carrure de Joël qui serait venu tout de même, éthique ou intelligence, sans doute les deux. 
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Aux deux extrêmes, les réactions sont plus "sincères" ou en tout cas meilleurs. Les gens simples, sans idées politiques préformées sont infiniment plus réactifs car ils n'ont pas l'esprit embrumé de scories ... et les vrais politiques à l'assise intellectuelle solide, eux, agissent à bon escient. Au milieu, parmi les militants "moyens", on a ceux qui, devant presque n'importe quelle histoire, avant de s'engager, se demandent toujours "qu'est-ce que ça va nous apporter? ou qu'en pensera le Parti ? ou le chef?" 
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Chez les gens de gauche, l'éthique prévaut certes en principe.. mais ce sont presque toujours les exploités directs -ou même l'individu en le cas- qui spontanément réagissent : les "pro", eux, réfléchissent, parfois cherchent à récupérer. Et lorsqu'ils ont pris leur décision, l'histoire est souvent terminée ; ce n'est pas forcément de l'opportunisme mais relié à leur statut : comme les riches qui copinent avec des pauvres, ils redoutent toujours -et cela doit arriver parfois- d'être utilisés par des cocus et préfèrent, eux, les utiliser avant.. ou les éviter lorsqu'on ne sait pas encore s'ils peuvent servir. Distance, réflexion.. Et ils s'engagent enfin lorsqu'il n'y en a plus besoin et même que leur position est plutôt gênante. Ça s'appelle récupérer. 

Mais le plus agaçant est ce phénomène étrange qui les fonde à parler au nom du "nous", c'est plus sûr, ou du "on", étant entendu [même s'ils ne sont que trois voire moins] qu'ils ne sont que les portes paroles d'un "nous" tout puissant immense redoutable et intelligent, quasi infaillible auquel il leur faut se plier -pratique lorsqu'ils sont critiqués par exemple-. Je dirais qu'ils se "nounoient". Sur ce coup, ils [je parle des "pro" qui diffent tous les mardis des feuilles codées bourrées de sigles que l'on ne comprend pas] ont été nullissimes.